Notre ami sagittairien est un gourmand, fin gourmet, il aime ce qui a du corps, ce qui a du caractère, son palais a le sens aristocratique !
C’est le royaume de Pantagruel, de Rabelais, il aime les tables appétissantes, opulentes, délirantes, c’est à la fois la quantité et la qualité, la cuisine à la mode de Brillat-Savarin, de Curnonsky ou d’Escoffier, la cuisine dite « bourgeoise ». Il aime entendre le concert des batteries de cuisine et renifler les fumets odorants, prélude aux voluptueuses sarabandes de ses papilles.
Mais s’il aime s’amuser en jouant le « chef » dans la cuisine, se réjouir le palais à table, son plaisir commence déjà au marché devant les étals de victuailles. Toucher, palper, tâter, caresser la mangeaille, la sentir, en humer, respirer les odeurs, écouter le chant, ces premiers « flirts » augurent des délices proches.
Accompagnons notre ami faire son marché.
Plutôt carnassier et viande rouge que blanche, c’est un chasseur. Il apprécie une belle pièce de bœuf déclinée de diverses manières, en daube, ragoût, « à la ficelle » ou en grillade qu’il cuisine bourgeoisement en sauce. Pour sortir des sentiers battus, un pavé d’autruche, un ragoût de bison ou un filet de kangourou l’emportent dans un lointain voyage. Évitez de lui servir du cheval, il ruerait dans les brancards ! Il aime le produit de sa chasse qu’il considère essentiellement comme un sport, il se lèche les babines avec un salmis de bécasses, une ballottine de faisan ou encore un cimier* de cerf. Bien que Jupiter soit le frère de Neptune, le dieu des mers et océans, ils ne partagent vraiment pas les mêmes valeurs ! Notre ami ne fréquente pas ou peu les poissonniers, ne trouvant à leur étalage que très peu de chose à son goût si ce n’est la sole, le saumon sauvage ou le turbot, noblesse oblige ! Il se mitonnera une bisque de homard, une nage d’écrevisses, une poêlée de gambas ou des quenelles de brochet accompagnées d’une sauce Nantua par exemple.
Chez la marchande des quatre saisons, on trouvera tout naturellement dans son panier des légumes et fruits qui en plus de lui faire plaisir ont pour la plupart la propriété de dissiper les congestions, les stases ou engorgements digestifs dus à une nourriture riche et abondante. Les champions de l’élimination sont les choux qu’ils viennent de Bruxelles ou de Rome, les artichauts feront plaisir à son palais et à son foie. Les haricots verts, très énergétiques et réparateurs du système nerveux ont aussi des vertus diurétiques et soignent le diabète, ses feuilles apaisent l’eczéma et saviez-vous qu’il y en avait 472 variétés ! Les épinards, qui contrairement à ce que nous fait croire Popeye, ne décuplent pas nos forces, mais consommés très frais ou en salade sont riches en vitamines. Sa cousine l’arroche au goût légèrement salée, en salade ou en soupe, soigne la goutte !!! déconvenue fréquente chez nos amis qui résulte de leur amour de la bonne chair ! L’oseille, une autre cousine, que l’on peut cueillir à l’état sauvage dans nos prairies et qu’on appelle « surette« , donne de la saveur à ses sauces et, au passage, soigne les petites ulcérations buccales, draine le foie et les reins, fait baisser la fièvre. Une autre plante aromatique qui a ses faveurs est le basilic, il aide à la digestion et fait des merveilles sur l’acné. L’été, ses feuilles éloignent les moustiques. Sans oublier la menthe connue depuis la plus Haute Antiquité pour ses vertus digestives et … aphrodisiaques ! En guise d’amuse-bouche, il choisira des olives vertes (les pas mûres) ou noires (les mûres) dont l’huile assaisonne ses salades qu’il agrémente de fleurs de violette, on l’utilise aussi comme laxatif. Sa branche est un symbole de paix !
Du côté des champignons, on y retrouve des saveurs « musclées » et nobles ! La morille printanière qui accompagnera royalement les ris de veau, les cèpes en fricassée et autres truffes ! Notre reine périgourdine convolera voluptueusement avec le foie gras, et abandonnée dans un panier d’œufs les parfumera savoureusement.
Pour donner du corps et du caractère à sa cuisine, les épices sont ses complices ! Il les choisit nobles pour donner de l’ampleur et une note exotique à ses mets. Le safran, la plus noble et sacrée en Inde, donnera une couleur qui lui est particulière, on dit de lui qu’il est aphrodisiaque, il calme les nerfs, les rhumatismes, les crampes du foie. Sa compatriote, la cardamome dont les graines sont symboles d’hospitalité parfume le thé, le pain, les desserts et participe aux currys, ses feuilles mâchées rafraîchissent l’haleine. Plus tropicale et aidant à la digestion, la girofle est aussi insecticide et antiseptique, ses feuilles calment les maux d’yeux ; les cylindres d’écorce de cannelle parfume agréablement les desserts, le vin, et combat l’hypertension; l’aphrodisiaque noix de muscade « qui ouvre son cœur aux merveilles de la création » est très agréable en cuisine et dans les desserts, mais peut cependant augmenter les effets nocifs de l’alcool ! Le macis qui est son enveloppe (l’arille) entre dans la composition des currys.
Chez le crémier, son choix se portera sur des fromages qui ont du caractère, à la « croûte fleurie » au lait de vache comme le Camembert, le Pont l’Evêque, les vacherins.
La cerise sur le gâteau est plutôt dans le gâteau, dans la Forêt-Noire bien évidemment ou chaude dans une coupe de la glace ! Le chocolat sous toutes ses formes et dans tous ses états lui fera une feria papillaire ! Le cacao qui sert à sa fabrication était déjà connu des Aztèques, il débarque en Europe dans les caravelles de Cortez**. La rumeur populaire lui attribue des vertus aphrodisiaques, très utile à l’amoureux généreux qu’il est, il a besoin de reconstituant pour garder toute sa vigueur, certains iront jusqu’à l’appeler « la nourriture des dieux »*** !
Pour clore ses agapes et surtout l’aider dans sa digestion, il appréciera quelques fruits. À commencer par les figues, le figuier est un arbre sacré en Inde, il symbolise la Connaissance et l’éveil, deux postulats du signe, il les aime fraîches ou sèches, elles stimulent son transit tout comme la compote de rhubarbe. Le citron, grand pourvoyeur de vitamine C, très tonique et digestif, dégage le foie, combat le diabète et la sclérose des artères ; de succulentes fraises surtout si elles sont des bois, diminuent la nocivité des excès alimentaires. Les savoureuses poires à la chaire onctueuse, sont très bonnes pour l’estomac, surtout si vous les cuisez avec du miel, Pline*** dit que la poire « coupée en tranches et séchée sur un fil remédie aux relâchements du ventre ». Les amandes et noisettes qui se cuisinent depuis la « nuit des temps », les feuilles du noisetier étaient dans des époques lointaines un substitut au tabac. Et sans oublier la vigne ! dont le jus est le nectar des dieux ! à consommer avec modération, si non gare aux migraines !
* Cimier : croupe de bête fauve, pièce de boucherie dans la croupe.
** Cortez, conquistador espagnol (1485 – 1547), qui soumit le Mexique et détruisit l’Empire Aztèque.
*** appellation donnée par Linné, médecin suédois (1707 – 1778) qui classa les plantes selon leur sexualité. Cela fit scandale et fut abandonné.
*** Pline l’Ancien : écrivain latin du 1er siècle après JC, il écrit une véritable encyclopédie « Histoires naturelles », recueil de connaissance des anciens. Il meurt asphyxié dans l’éruption du Vésuve.